Balkanisation et domination : Israël, supplétif des États-Unis au Proche-Orient

Balkanisation et domination : Israël, supplétif des États-Unis au Proche-Orient


Jad Kabbanji
Clarté – Novembre 2024


Le lundi 21 octobre, le secrétaire à la Défense des États-Unis, Lloyd Austin, a confirmé que le système de défense antimissile THAAD, accompagné de 100 soldats pour en assurer le fonctionnement, est désormais opérationnel en Israël. Cette annonce s’inscrit dans un contexte où les États-Unis sont de plus en plus impliqués, depuis le 7 octobre, dans la guerre génocidaire menée par Israël contre le peuple palestinien. Leur implication s’est accentuée depuis septembre dernier avec une série de bombardements et d’assassinats ciblés, touchant à la fois la population et la résistance libanaises. En effet, en ciblant le Liban, Washington, avant-garde de l’impérialisme et de son bras armé l’OTAN, cherche à affaiblir définitivement l’Iran et à remodeler la région selon ses intérêts, favorisant ainsi une fragmentation qui consoliderait son influence économique.

La stratégie de balkanisation

Cette fragmentation n’est pas un phénomène nouveau. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et la formation d’États-nations au Moyen-Orient, les États-Unis ont délibérément cherché à affaiblir ces entités afin de fragmenter la région en groupes confessionnels et ethniques. Cette approche, déjà visible dans le passé, est devenue concrète après l’invasion de l’Irak en 2003. Elle vise à créer une mosaïque de micro-États et de factions sectaires plus faciles à contrôler. Ainsi, en soutenant des milices locales et en intervenant militairement, les États-Unis ont exacerbé les divisions religieuses et ethniques, notamment en Irak, en Syrie et en Libye.

L’impact de cette stratégie est clair : elle a permis de déstabiliser les régimes centralisés opposés à projet. En Irak, par exemple, l’invasion de 2003 a provoqué l’effondrement de l’État-nation, en intensifiant les divisions entre sunnites, chiites et Kurdes. Parallèlement, en Syrie et en Libye, les guerres civiles, nourries par l’ingérence américaine, ont permis la montée de groupes armés sectaires qui se disputent le contrôle des territoires. Cette politique de fragmentation n’est pas un accident, mais bien une tactique délibérée pour affaiblir les États-nations, facilitant ainsi le contrôle des ressources et l’influence dans cette région stratégique.

Le Liban, un modèle pour la domination impérialiste

Le Liban illustre bien cette logique. Plus encore, le système confessionnel libanais, qui existe depuis 1943, représente le modèle à suivre dans la région selon les États-Unis. En effet, la fragmentation du pays selon des lignes sectaires facilite l’ingérence et renforce l’influence étrangère, tout en sapant les fondements d’un État-nation cohérent et souverain. Le Liban est un exemple de la manière dont un système politique basé sur des divisions confessionnelles peut être exploité par les intérêts impérialistes au détriment du bien-être de sa population. En somme, pour les États-Unis, cette structure politique doit être généralisée à toute la région. Comment le Liban peut-il résister aux États-Unis et à son bras armé, Israël ? La réponse réside dans l’aspiration à un État uni, déconfessionnalisé, qui incarne la résistance contre Israël, plutôt qu’un État divisé qui a failli à sa mission de protéger, de nourrir et de reloger plus d’un million de civils fuyant l’invasion et les bombardements.

Il y a tout juste cinq ans, le 17 octobre 2019, le pays s’est soulevé contre cet État libanais fantoche. Une partie des revendications de la population portait justement sur l’établissement d’un nouveau régime qui ne serait pas au service des monopoles étrangers. Car, pour résister, une partie des Libanais avait pris conscience que le Liban doit transcender ses divisions confessionnelles et promouvoir un projet de société fondé sur l’égalité et la justice. Cela nécessitera non seulement une révision de son modèle politique, mais aussi une véritable mobilisation des forces populaires en faveur d’un changement radical. Ainsi, la résistance libanaise doit s’articuler autour d’un État fort et déconfessionnalisé, capable de défendre ses citoyens et de s’opposer aux agressions extérieures. C’est en somme les principales revendications de nos homologues libanais au sein du Comité libanais pour la paix et la solidarité, organisation membre du Conseil mondial pour la paix

Solidarité et mobilisation pour la paix.

Face à cette situation et à l’incapacité de l’État libanais à soutenir sa population, il est essentiel de renforcer notre solidarité avec les victimes de l’agression israélienne. Dans cette optique, le Mouvement québécois pour la paix (MQP), en collaboration avec le Centre culturel libanais, a organisé une collecte de fonds au profit du Secours populaire libanais, une organisation active depuis 1974 notamment au Sud-Liban.

En parallèle, nous devons également nous mobiliser pour exiger un cessez-le-feu immédiat et unilatéral. Ici, au Québec et au Canada, alors que notre province s’engage de plus en plus dans la machine de guerre de l’OTAN sous la direction des États-Unis, il est essentiel de maintenir le cap de la paix. Il est important de noter que l’OTAN vise à déstabiliser non seulement le Moyen-Orient, mais aussi le monde entier, pour dissimuler ses faiblesses internes face à la montée en puissance de puissances émergentes et plus particulièrement de la Chine.

Résistance à l’OTAN : une urgence

Cette urgence de résister à l’OTAN et à ses politiques de déstabilisations est d’autant plus pressante que le Parlement de l’organisation se tiendra à Montréal du 22 au 25 novembre prochain. Dans ce cadre, le MQP, en collaboration avec le Canada-Wide Peace and Justice Network, organise une grande manifestation le 23 novembre, suivie d’un contre sommet le 24, qui se déroulera à l’Association des travailleurs grecs du Québec.

En somme, il est impératif que nous nous unissions pour mener ce combat pour la paix, qui passe par la sortie du Canada de l’OTAN. Car, ensemble, nous pouvons influer sur le cours des événements et défendre un avenir fondé sur la justice et la paix, loin des logiques de guerre.