Du lithium à l’armement : L’évolution du rôle du Québec dans les conflits orchestrés par l’OTAN

Du lithium à l’armement : L’évolution du rôle du Québec dans les conflits orchestrés par l’OTAN


Jad Kabbanji

Mouvement québécois pour la Paix
mqp-qc.org
Clarté #59 – Octobre 2024


L’OTAN regroupe la majorité des pays européens, ainsi que le Canada et les États-Unis. Bien que le Québec, en tant que province canadienne, ne dispose pas de sa propre armée et n’a pas vocation à participer directement aux conflits fomentés par cette organisation, son rôle dans le soutien militaire et économique des régimes alliés à l’OTAN s’est considérablement renforcé ces dernières années. Le monde se rapprochant dangereusement d’un conflit globalisé, il est pertinent de se poser les questions suivantes : de quelle manière le Québec s’insère-t-il dans le système impérialiste occidental et comment contrer son implication croissante dans la politique de tension orchestrée par ce bloc ?

Le sous-sol québécois : Un avant-poste de la guerre froide?

En effet, l’impérialisme contemporain est intimement lié à l’évolution du mode de production dans les pays occidentaux. Le développement des entreprises monopolistiques, la domination du capital financier, l’expansion des multinationales et la course pour le pillage des ressources naturelles conduisent au contrôle des marchés mondiaux. Cela est particulièrement vrai pour le Québec, dont l’économie, comme celle du reste du Canada, est étroitement contrôlée par le puissant voisin du sud.

Ainsi, depuis quelques années, les États-Unis ont fait de la filière batterie électrique une priorité absolue afin de rattraper le retard sur la Chine, championne mondiale dans ce domaine. Et le Québec dans tout ça ? Et bien, le sous-sol de notre province regorge de minéraux indispensables à la fabrication de batteries électriques : spodumène (lithium), graphite, ilménite (titane), apatite (phosphate), cobalt (en sous-produit des mines de nickel), nickel et fer. C’est donc tout naturellement que le gouvernement Legault a fait à son tour du développement de cette industrie une priorité absolue afin de faire de la province un avant-post dans la guerre froide que mènent les États-Unis contre la Chine.

En outre, les investissements miniers états-uniens sont déjà arrivés au Québec. Récemment, le gouvernement fédéral et le département de la Défense des États-Unis (DOD) ont annoncé un investissement de plusieurs millions de dollars pour développer un projet de mine de graphite dans la MRC de Papineau en Outaouais, au grand damne des citoyennes et des citoyens de la circonscription. Toutefois, plus personne n’est dupe, comme le confirme les propos de Claude Bouffard, coordonnateur du Comité citoyen d’opposition au projet minier La Loutre : « C’est rendu que nos ressources serviront aux besoins de l’armée américaine et qu’elles se retrouvent impliquées dans la guerre froide qui oppose la Chine aux États-Unis. Ce n’est plus du tout la transition énergétique et l’électrification des transports dont on nous parlait. » D’ailleurs, Robert P. Sanders, consul général des États-Unis à Montréal, a confirmé au Journal de Montréal en juin dernier que cet investissement n’est qu’un début et qu’il fallait s’attendre à d’autres dans un avenir proche.

Des munitions québécoises au service de l’OTAN 

Cependant, l’exportation de nos ressources naturelles ne semble plus suffire aux gouvernements fédéral et provincial. Ces derniers souhaitent désormais faire du Québec un acteur direct dans l’escalade des conflits fomentés ou encouragés par l’Occident, notamment par le biais de l’industrie de l’armement. La multinationale américaine General Dynamics, implantée au Québec, produit depuis plus de deux ans une partie des munitions que l’OTAN envoie en Ukraine, contribuant ainsi directement à la prolongation des conflits en Ukraine et en Russie. De plus, la multinationale prévoit une expansion significative de son usine à Salaberry-de-Valleyfield afin de renforcer les stocks d’obus, arme qui s’est avérée cruciale dans la guerre en Ukraine.

Les armes fabriquées par General Dynamics sont également appelées à être exportées en Israël. Récemment, il a été révélé que les sites québécois de General Dynamics vont expédier des obus à Israël à la demande du gouvernement américain. En août dernier, l’administration Biden a proposé au Congrès américain de donner son accord pour la vente de 50 000 munitions à Israël. Si cette transaction est approuvée, la majorité de ces obus de mortier seront fabriqués au Québec, toujours selon l’administration Biden. Pourtant, en mars dernier, une motion votée à la Chambre des communes visait à mettre fin aux exportations d’armes létales vers Israël. Les États-Unis n’ont-ils pas eu vent de cette décision ? Ou les intérêts des États-Unis passent-ils avant le respect de la souveraineté des nations ?

Montréal, ville de paix contre l’OTAN

Du 22 au 25 novembre prochain aura lieu la 70e Session Annuelle de l’OTAN à Montréal. Le fait que cette rencontre se passe à Montréal n’est aucunement anodin. En effet, le Québec semble devenir un acteur clé dans le système impérialiste occidental sous l’hégémonie états-unienne et de son bras armé l’OTAN. Pourtant, le Québec et particulièrement la métropole montréalaise ont de tout temps été à l’avant-garde du mouvement pour la paix au Canada : des manifestants s’opposant à la guerre des étoiles à ceux luttant contre la guerre en Irak et en passant par ceux battant le pavé contre le génocide en Palestine. En suivant cette tradition, le Mouvement québécois pour la paix s’engage à organiser une série de mobilisations rassembleuses pour dénoncer l’Alliance atlantique et pour s’opposer fermement à la tournure que prend la province ces dernières années. Plus que jamais, Montréal doit devenir une ville de paix !