Iran : que conclure après 5 mois de soulèvement populaire?
Iran : que conclure après 5 mois de soulèvement populaire?
Bureau international
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Clarté #49 – Janvier 2023
Cinq mois se sont écoulés depuis l’assassinat de Mahsa Amini par la Police des mœurs le 16 septembre dernier. Les manifestations qui ont suivi cet acte ignoble se sont rapidement converties en un mouvement populaire contre le régime dictatorial et théocratique de la République islamique d’Iran. La lutte s’est rapidement intensifiée malgré une répression féroce (on parle à ce jour de plusieurs milliers d’arrestations).
Rapidement, les étudiant-es, les professeurs, les travailleur-euses, les commerçant-es, etc. se sont joints à cette lutte qui ne faiblit pas. Preuve de son intensification, les ouvriers contractuels de deux raffineries ont déclenché une grève en solidarité avec le mouvement, mais aussi contre les politiques économiques de privatisation qui induisent une inflation galopante dans ce pays où plus de 97% des salarié-es sont précaires.
Évidemment, l’impérialisme occidental n’a pas hésité à instrumentaliser ce soulèvement au profit de ses intérêts prédateurs dans un contexte de crise énergétique où il salive à l’idée de faire main basse sur l’or noir iranien. C’est ainsi dans la foulée que Trudeau a imposé de nouvelles sanctions à l’Iran. Qu’il y ait des agents de l’impérialisme infiltrés dans ces soulèvements ne fait aucun doute, mais l’histoire suffit à prouver que le peuple iranien sait se porter garant de sa souveraineté et ne succombera pas au chant des sirènes occidentales.
Il est évident que la tâche la plus importante est de dénoncer le plus fermement les sanctions imposées à l’Iran de sorte que le peuple iranien puisse décider souverainement de son avenir. Cependant, prétendre que le gouvernement iranien doit rester en place sous prétexte qu’il est anti-impérialiste relève d’une vision caricaturée et manichéenne qui pervertit la lutte contre l’impérialisme.
L’anti-américanisme de circonstance du gouvernement iranien n’a rien à voir avec l’anti-impérialisme, tout comme son appui intéressé à certains éléments de la résistance palestinienne. L’assassinat de dirigeants communistes en 1988, l’appui aux Contras du Nicaragua ainsi qu’aux moudjahidines en lutte contre le gouvernement progressiste et laïc de Najibullah en Afghanistan l’illustrent. Plus récemment, l’Iran n’a eu aucun scrupule à s’allier à la Turquie (membre de l’OTAN) pour bombarder le Kurdistan irakien.
L’impérialisme n’est pas l’apanage d’un pays, mais bien un système global enraciné dans le capitalisme. Par conséquent, la lutte anti-impérialiste ne saurait se résumer à la défense d’un pays ou d’un seul pays, mais la lutte des peuples contre le pouvoir des monopoles. Ainsi, en luttant contre les mesures dictées par le FMI qu’applique le gouvernement iranien, les salarié-es ne minent pas la souveraineté du pays. Ils en demandent plus : plus de souveraineté, plus de droits démocratiques et syndicaux; pas plus de sanctions et d’ingérences.
Au final, la lutte la plus acharnée n’est pas entre la République islamique d’Iran et l’impérialisme occidental, mais entre celui-ci et un Iran laïc, démocratique et réellement anti-impérialiste.