Les échecs du Congrès de la Fédération étudiante de l’UdeS
Les échecs du Congrès de la Fédération étudiante de l’UdeS
Léo Boivin
redaction@journalclarte.ca
Février 2023
Réunies en congrès le dimanche 5 février 2023, les associations étudiantes membres de la Fédération étudiante de l’Université de Sherbrooke (FEUS) se sont prononcées sur les mandats de leurs représentant.e.s à la Fédération, et sur les positions politiques de ce regroupement représentant plus de 15 000 membres sur l’ensemble des campus de l’Université de Sherbrooke.
Malheureusement, malgré la discussion qui fût fougueuse par moments, le Congrès a refusé de se prononcer sur les questions politiques de fond entourant la conjoncture du moment. Il a également refusé de s’engager dans la lutte pour la gratuité scolaire, remettant en question sa souhaitabilité.
Ce Congrès, il se résume par deux grands échecs.
Échec sur la question de l’impérialisme
L’invasion illégale et dévastatrice de l’Ukraine par la Fédération de Russie l’an dernier, et la guerre qui s’en est ensuivie n’a pas fini de faire couler l’encre. La FEUS s’est donc positionnée lors de son Congrès contre les guerres « qui n’ont pas comme objectif de défendre les droits et libertés humaines. »
Ce concept cité de « droits et libertés » est bien éloquent, mais très imprécis. La guerre en Irak, l’invasion de l’Ukraine, la guerre en Yougoslavie, l’occupation illégale d’Israël en Palestine, etc. ont toutes été « justifiés » par les parties agresseures – les parties impérialistes – comme étant « en défense des droits humains. »
Une seule délégation sur onze (4 délégué.e.s sur plus d’une soixantaine) a tenté de remettre à l’ordre le congrès en mettant en évidence le lien indéniable entre l’agression armée et l’impérialisme. La délégation en question a aussi insisté sur le rôle de l’impérialisme dans la suppression de la souveraineté des pays impérialisés au profit des pays capitalistes les plus riches, et la nature exploitatrice de cette relation.
Plutôt que de baser son analyse dans des termes scientifiques, et d’adopter une position large contre l’impérialisme, le congrès a préféré répéter l’appel à la guerre de la bourgeoisie des pays de l’OTAN en usant d’une position facilement adultérable par cette dernière. La lutte à l’impérialisme, elle, ne peut être détournée en faveur de la bourgeoisie, car elle s’y attaque directement.
La FEUS a donc commis l’erreur grave d’abdiquer de son potentiel dans la construction d’une coalition antiimpérialiste large au Québec, d’un mouvement québécois pour la paix.
Échec sur la question de la gratuité scolaire
Le mouvement pour la gratuité scolaire est la lutte la plus importante pour le mouvement étudiant à-travers le Québec. Comment s’expliquer alors que les discussions émanant du Congrès de la FEUS semblaient remettre en question la vertu de militer pour cette fin? La position de classe des délégué.e.s serait peut être également à remettre en question. Certaines délégations refusaient de s’immiscer dans le débat pour cause de la nature politique de ce dernier. Ce prétexte n’est en fait que couardise devant un enjeu central.
Le programme de bourses Perspective Québec a beaucoup fait couler d’encre dans le sens où il s’estime solution à la « pénurie » de main-d’œuvre dans les secteurs-clé de l’économie. C’est utiliser la logique du marché pour faire obéir l’éducation à la volonté politique des monopoles. C’est se bander les yeux devant le véritable problème : les conditions de travail de misère.
Dans un communiqué de presse, l’Association générale étudiante en sciences de l’UdeS, la seule délégation à avoir défendu avec fougue le renforcement de la position de la FEUS en faveur de la gratuité scolaire et y ajouter une disposition contre le programme de bourses Perspective, énonçait : « Force est de se demander pourquoi alors cette demande éternelle du mouvement étudiant pour la gratuité scolaire tombe sur une sourde oreille. Serait-ce parce que la démarchandisation de l’éducation déséquilibrerait le statuquo prêché par le slogan “Continuons” ? L’unité du mouvement étudiant est critique. Malheureusement, il semblerait que le gouvernement Legault ait trouvé le moyen idéal de la dissoudre. L’AGES œuvrera corps et âme pour la maintenir »
Si l’unité du mouvement étudiant est absolument critique pour l’atteinte de la gratuité scolaire, c’est à se demander si le programme de bourses Perspective avait un effet secondaire très souhaité par le gouvernement.
En entrevue avec Clarté, Justin Laroche, responsable à la coordination de l’AGES, affirmait à propos du refus du congrès de la FEUS de se prononcer sur la question des bourses Perspectives que : « c’est difficilement compréhensible considérant les prises de positions passées. La réaction au dernier congrès est étrange, et même décevante pour l’AGES. ».
La plus grande erreur du congrès de la FEUS aura été, selon l’AGES, d’avoir mis à plus tard une discussion d’importance capitale pour le mouvement étudiant.
Que faire?
L’unité du mouvement étudiant est à consolider, voire à bâtir de fragments, de rien du tout. Au moment d’écrire ces lignes, le congrès de fondation d’une nouvelle association étudiante nationale à l’image de l’ASSÉ était à veille d’être tenu. Les efforts de toustes les personnes étudiantes et de leurs associations seront requis pour faire vivre ce projet d’unité.
Il faudra également veiller à ce que la politique menchévique d’abdication des responsabilités d’agitation politique ne puisse perméer dans cette nouvelle opportunité d’unité. Le rôle du parti communiste sera donc indéniable.